Ce matin... impossible de me lever bonne heure... 'Faut dire que je me suis couchée tard, très tard... Il fallait que je règle mon départ d'ici.

Ma première idée était de prendre un bus Pangandaran-Jogyakarta airport mais quand j'ai appris le nombre d'heures que j'allais passer assise dans un encore frigidaire roulant (9 heures)... J'ai choisi l'option "train" en mode Economy sauf que j'ai appris hier soir que je n'avais plus de place dans cette catégorie. Obligée de voyager en business class, un chouïa plus cher, certainement plus confortable... Mais, je me retrouvais alors hors budget surtout si je passais une nuit à Jogyakarta. Comme la Malaisie m'a coûté un bras avec ces histoires de prix qui changeaient tout le temps avec la fin du Ramadan et les vacances de fin de Ramadan... il fallait que je réfléchisse à la suite à donner à cet encore débordement de budget. 31 32, y'avait pas à tortiller, pour équilibrer je devais oublier Jogya et partir directement sur Denpasar. L'affaire décidée, vers 20h, vroum vroum sur Chouchou d'Amour (ici les agences sont toujours allumées jusqu'à tard le soir), je suis partie acheter mon billet d'avion. Les connexions internet avec deux de tension n'aidant pas, je me suis couchée encore à pas d'heure ! Mais j'ai mon ticket in the pocket et je décolle demain à 20h50 sur Lion Air.

Demain, je retrouve Bali la Douce... l'île des Dieux et ses frangipaniers. Je me suis endormie épuisée mais... heureuse. 

C'est donc vers 10h du matin que j'arrive au National Parc me traitant de grosse feignasse et craignant d'être dérangée par une foule en masse arrivée pour le week-end.

Je suis accueillie par une flopée de guides qui me proposent leurs services, me disant qu'il est préférable de se faire accompagner car on peut se perdre dans cette immensité et que les macaques y sont très agressifs... Voui... mais non ! Déjà que j'attaque ma journée avec du retard, je veux pouvoir prendre mon temps sans être obligée de suivre Pincou ou Zincou qui vont, certes, me raconter des choses intéressantes, mais moi, ce que je veux, c'est pouvoir sentir cette forêt, m'embrasser les arbres, leur parler et les entendre me répondre (qu'on va trop me prendre pour une fadade) et pouvoir travailler tranquille et à mon rythme. Tidak Terima Kasih, non merci et me voilà partie en suivant les chemins balisés de ce début de parc.

A ma grande surprise, les lieux sont déserts... et j'entre au royaume du vert et du gris, dans un silence de Reine ! 

Pour ceux qui connaissent la Monkey Forest sur Bali, on va dire que c'est la même ambiance, la même végétation avec en plus la mangrove, sans les temples et en mille fois plus grand, le tout bordé par l'Océan Indien ! Mais, aucune inquiétude, on ne risque pas s'y perdre si on suit bien entendu les chemins bien tracés et bien indiqués, ce que je fais puisque je m'y aventure seule. Et seule, je le suis vraiment ! Si je croise à tout casser une dizaine de personnes, tous des gens du coin, c'est bien le maximum. Vous pouvez imaginer comme je suis merveilleusement bien. J'aime les gens mais j'aime aussi ma solitude... Quand tout est choisi et désiré, là, se trouve l’équilibre et l'harmonie avec soi-même.

C'est la position du soleil qui me fait prendre la direction de la plage à l'épave, cargo échoué qu'on ne peut pas louper tant il surprend dans le paysage de Pangandaran quand on y arrive. Au bout de trente minutes de marche, instinctivement, l'oreille se met en éveil. Dans la jungle, le silence n'existe pas vraiment, même pas du tout. Des tas de bruits surgissent, de tout petits bruits qui décuplent à l'oreille. Le sol est jonché de ces larges feuilles qui font un bruit d'enfer quand elles tombent et qui, si elles vous tombent sur la tête, vous réveillent un brin ! 

Du vert, elles passent par toutes les couleurs jusqu'au dessèchement total qui me fait penser au vieillissement contre lequel Dame Nature n'épargne aucun être vivant ici bas... Vivre dans le Vert et dans le Bleu avant que nous aussi, nous ne tombions de nos arbres perchés... Voui,  je pars un peu en couillettis dès que je me retrouve seule avec mes pensées, sur le pourquoi du comment de notre passage sur Terre ! 

Très vite, les chemins pavés font place à des chemins beaucoup plus chaotiques. Je suppose que cet endroit n'a pas du toujours être tranquille puisque la roche est éclatée, souvent volcanique ou océanique car les coraux cassés et les coquillages s'y trouvent également en grand nombre. Ne pas partir en tatanes, conseil de Mistouline !

Comme à mon habitude, je reste des heures devant un papillon, un arbre majestueux, un rayon de soleil sur une feuille, une forme étrange et inquiétante... Aucun guide ne me supporte, je les épuise, c'est bien pour ça que je n'en prends que rarement ! Je les épargne, peuchère d'eux !

Bien entendu, très vite, la forêt s'habituant à ma présence, tout s'agite dans les arbres... Mes collègues les macaques vivent ici en maîtres et, la franche vérité, j'ai jamais vu macaques aussi paisibles et sympathiques ! Plusieurs groupes se partagent cet immense territoire et si parfois quelques querelles font gronder la forêt de cris sonores, il s'agit plus d'intimidations que de razzias organisées les uns contre les autres.

Je m'assois souvent au milieu d'eux mais jamais ils ne m'abordent véritablement, ils m'acceptent me tolèrent et semblent parfois prendre la pose devant l'objectif.

Les mamans sont les seules à me tenir à distance et à montrer les dents si jamais je dépasse les limites autorisées.

Ils sont de partout dans la forêt, au sol ou dans les arbres, dans la mangrove, sur les plages... et c'est un plaisir immense d'être au milieu d'eux, en total respect mutuel.

Parfois de grands escaliers grimpent un chouïa vers on ne sait quoi... On découvre alors des grottes que la mer a du ronger, toutes cafi de stalactites ou stalagmites, profondes et sombres à l'entrée desquelles se trouvent des tombes... Ne me demandez pas de quoi il s'agit, là, la nécessité d'un guide est sur le sujet, indispensable !

Elles s'enfoncent parfois très profondément dans les falaises mais j'ai trop peur des serpents pour m'y engouffrer plus avant, ce coup-ci ! J'ai trop le souvenir des tombes de Sulawesi où ces serpentins s'en donnaient à cœur joie de nous faire des frayeurs !

C'est ainsi que j'arrive à la plage de l'épave et là, j'ai l'heureuse et magique surprise de me retrouver nez à nez avec...

Tout comme les macaques, les biches et les cerfs se promènent ici en toute liberté. J'en croise dans la forêt, peu peureux mais qui restent à distance tout de même. Eux-aussi s'habituent à ma présence et c'est un régal de vivre en harmonie avec toute cette Nature qui m'entoure de ses bras.

La plage de l'épave est pratiquement déserte. Quelques bateaux font la navette avec Pandangaran, amenant les touristes locaux voulant faire du snorkeling. Mais l'eau est si troublée par ce banc de sable tourneboulé par les vagues que je me demande bien ce qu'ils peuvent observer de la faune marine.

Je m'éloigne très vite de cette petite foule pour m'approcher de cette épave qui m'intrigue depuis mon arrivée et qui fait polémique chez les gens d'ici, au milieu de ce Parc National si préservé.

En m'asseyant sur le sable, face à cette embarcation échouée, je ne peux m'empêcher d'y voir un peuchère de bateau triste qui pleure sa grande mer à jamais perdue... Je le trouve très poétique et mes pensées s'enfuient vers le large comme je le fais si souvent quand je suis au bord de ma propre mer qui m'apaise et dont je ne peux jamais m'éloigner trop longtemps...

Quelques pêcheurs au filet me rappellent que nous sommes en Indonésie. Parc ou pas Parc National, on va pêcher, là où on l'a toujours fait et où on le fera toujours...

Mais la chaleur sur ce sable qui fait réverbération devient intenable et me pousse à rejoindre la forêt et l'ombre où s'élèvent des nuages de vapeur trop beaux dans ces feuillages où se cachent d'autres merveilles, j'en suis certaine ! Et puis, je n'ai pas trop le choix, la plage se termine par des coraux cassés, brisés et la jungle non-balisée commence... Sans guide, il est dangereux de s'y perdre et vous le savez, j'ai le chic pour ce genre de mésaventure ! 

Dix minutes après avoir pénétré cette forêt aux couleurs nouvelles, j'entends au-dessus de ma tête ce que j'espère depuis le matin. Ils sont là, peureux, discrets mais m'observent tous du haut de leurs perchoirs. 

J'en ai le torticolis à force de travailler la tête en l'air avec ce cou douloureux que la Malaisie et ses oreillers n'ont pas épargné ! Alors je m'allonge de tout mon long dans ces feuilles qui me font tapis et je reste là à me régaler de ces petits orangs noirs au regard si naïf, si pur, si innocent. Moments de pur bonheur, de félicité totale... Pour rrrrrien au monde, je ne donnerais ma place à quelqu'un ! 

Un varan s'approche et me fait me relever aussi sec, j'ai trop abusé d'une position horizontale qui me rend un chouïa vulnérable !

Quand j'arrive sur la plage opposée, celle du village sur pilotis des pêcheurs, les biches sont là, comme si elles m'attendaient, paisibles et calmes face à la mer. C'est un paysage d'Eden sur terre... ça sieste d'une force que j'ai presque l'envie d'en faire autant !

Mais je suis loin d'avoir terminé mon exploration des lieux et ma curiosité toujours plus grande et plus forte me pousse à poursuivre vers le Nord où les chemins se dirigent. Forêt, cerfs, varans, singes, papillons et oiseaux commencent déjà à célébrer le soleil qui faiblit. Et puis, soudain, le chemin s'arrête devant la sortie d'une source.

Un Indonésien m'y accueille d'un charmant sourire et voyant mon air intrigué devant un écriteau incompréhensible, m'explique que je suis à présent entrée dans le Domaine des légendes magiques... Tout ce que j'aime ! Si ici, on est en majorité musulmans, ça n'empêche pas de toujours croire aux vieilles histoires qui hantent les forêts et celle-ci en particulier ! J'apprends que cette source est magique, qu'elle apporte à ceux qui s'y plongent ou qui s'y lavent, la jeunesse et la santé éternelle... Vous pensez bien que j'allais pas rater ça !!!!

Petit bain discret derrière la roche, petites prières à la Déesse du coin, petite obole au gardien des lieux, la Mistouline plane à 2000 !

Quand j'arrive au village des pêcheurs installés sur l'eau comme les Bajos, je me pense que mon exploration est à présent terminée.

Et je regagne la sortie du parc par la plage. Les biches semblent vouloir aller se piter un bout au village les pieds dans l'eau... ça se carapate de partout et je devrais en faire autant, cette belle journée se termine et il me reste tant de choses à ranger pour le grand départ de demain !

Zou ! D'un pas décidé, je change de rythme mais une cavité sur la plage m'intrigue à nouveau... Qu'es aco !?

C'est une cavité bien plus profonde que toutes celles que j'ai visitées jusqu'à présent. La mer à marée montante s'y engouffre avec fracas parfois. 

ça me fait aussitôt penser à Uluwatu sur bali mais je trouve là aussi une superbe tombe surélevée dans la grotte. C'est très beau et la décoration est bien plus sophistiquée que toutes celles d'avant.

Passant de boyau en boyau, entre rochers et avancées de mer, je découvre de très belles stalagmites en formation.

Mais l'eau monte de trop et il faut que je rebrousse chemin. C'est vraiment un endroit à ne surtout pas rater avant de quitter les lieux ! 

Y'a des journées si belles qu'elles ne devraient jamais se terminer !

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Il est déjà 16 heures quand je sors de ce lieu magique et je me dis que j'ai encore oublié de manger ! Pitage sur la plage, retrouvailles avec Catherine, coucher de soleil toujours un peu couvert, quel dommage, je n'aurais pas vu les flamboyances de Pangandaran...

Comme ni moi ni Catherine n'aimons les au revoir... ils sont chaleureux et brefs, emplis de cette pudeur des gens qui s'aiment sans se connaître tout à fait mais qui se reconnaissent et qui se reverront certainement un jour.

Je m'empresse de ramasser toutes mes petites affaires bien éparpillées ici. Pépère bouclé et au garde à vous, je m'en vais vous bafouiller ma petite chronique du jour mais le Wifi me fait encore des misères. Quand je lève le nez de mon ordinateur aux arrêts, je vois rentrer au Mini Tiga un peuchère de Français, un peu beaucoup enrobé, éreinté, en sueur sous son gros sac et totalement paniqué parce qu'il arrive ici sans liquidité. Mama Sita Disa (la petite mère qui se charge de tout ici en l'absence de Catherine) lui indique le chemin du plus proche ATM. Mais il me fait peine ce Français qui je sens débarqué pour la première fois en Asie. ça se sent à des kilomètres ! 

Toujours en bug d'Internet, je décide d'enfourcher Chouchou et de le châler jusqu'à cet ATM bien loin de la guesthouse. Quand je le retrouve dans la nuit et que je lui offre de monter derrière moi jusqu'à destination, il saute sur mon scooter, met les pieds sur les cales sans se soucier de son poids, du mien et de notre situation à l'arrêt ! Mais qué counas que je me dis en accompagnant ma chute lente mais tout de même brutale ! Je n'ai qu'une idée en tête protéger le scooter ! Et me voilà, sous l'engin avec cet énergumène debout, ayant sauvé sa peau et n'ayant pas la lucidité de soulever l'engin très lourd sur moi. Ce sont les Indonésiens qui viennent m'aider à me soulever. Le scooter n'a rien mais mon pied, mon genou et mon coude sont tout écorchés et je pisse le sang que c'est rrrien de le dire ! Mais quelle conne que je m'engueule dans ma tête ! Ma gentillesse me perdra ! Revenue de mes émotions, je lui demande s'il a déjà fait du scooter. Non, me répond-il effondré devant mon état pitoyable. Ceci explique cela que je me pense... Il y a une première fois à tout mais j'aurais préféré qu'il s'exerce avec quelqu'un d'autre ! Zou ! C'est pas la peine de l'engueuler, il est déjà assez contrit comme ça... On reprend la route en mode "explication du fonctionnement à deux" et nous voilà devant l'ATM. C'est bien sa première fois en Asie et il ne sait pas s'en servir. Je viens encore à sa rescousse mais y'a rien à faire, sa carte de La Poste ne fonctionne pas. Mais qu'elle idée aussi de partir en Asie avec une carte de La Poste ! Qué misère, ces gens qui partent sans préparation pour de l'autre côté de la terre... Zou, deuxième ATM, troisième ATM... mais sans succès.

Quand je le ramène à la guesthouse, je réalise que pour la première fois de ma vie, je me suis rétamée en scooter, que je reprends la route demain et que j'ai peur de ne pas pouvoir marcher et assurer. Décidément les transferts cette année... sont bien compliqués pour moi !