Réveil difficile, pas bien dormi, sommeil coupé... Je voudrais bien me passer les nerfs sur les deux responsables de ce désastre avant ma première plongée mais ils dorment toujours ! Je ne sais pas ce qu'ils font de leur journée mais ils la passent enfermés dans leur chambre sans profiter ni de la mer ni de la campagne autour... Y'en a, je me demande pourquoi ils partent si loin pour rester enfermer dans une chambre climatisée ! Je sais bien qu'on peut y faire bien des choses pour passer le temps mais à ce stade, ça relève de l'inexplicable pour moi...

On va vite se prendre notre petit déjeuner chez notre voisine et on se tient prêts. On vient nous chercher à 9h. Heureusement qu'on est ready, notre shuttle qui nous mène au centre de plongée arrive un peu en avance. Je dis rien mais je balise un max !

Quand j'avais 8 ans, j'ai eu un accident banal de bicyclette. Je suis tombée à l'arrêt sur une pierre pointue qui m'a ouvert le tympan. Je suis restée trois jours dans le coma et j'ai eu des parasynthèses toute mon enfance... Le chirurgien qui m'a opéré avait dit à mes parents que je ne pourrais jamais plonger de ma Vie. J'ai toujours fait très attention en snorkeling, mes oreilles supportent l'eau mais le peu de fois où j'ai essayé de plonger, ne serait-ce que de quelques centimètres, une douleur est toujours venue me rappeler mon accident.

Marc est persuadé qu'à 56 ans, mon oreille a du se réparer toute seule, que l'organisme est plein de miracles... Je veux bien le croire, mais j'ai quand même très peur surtout qu'il y a plein de trucs techniques avec des chiffres (vous savez que moi et eux, ça le fait difficilement... ) et que j'ai la trouille de m’emmêler les pinceaux sous l'eau !

Quand on arrive au centre de plonger, tout est déjà réglé, on a payé Taruna hier soir, 2 100 000 roupies pour deux plongées chacun. Comme d'habitude, deux groupes. Celui des snorkelers et celui des divers et ça me fait drôle de ne plus être dans le premier...

Quand j'essaye le gilet avec tous les boutons qui vont avec, je me dis qu'il faut que j'arrête de stresser, ça va le faire, sans compter que Ganeshou est là pour me rassurer ! Et c'est toute décontractée que j'embarque avec mon professeur perso sur notre bateau. Marc a 500 plongées à son actif, je suis entre de bonnes mains.

La lagune et la mangrove sont toujours aussi jolies avec toutes ces montagnes qui nous regardent mais le ciel est encore incertain... On n'a vraiment pas de chance avec la météo...

La traversée vers Menjangan se fait sur une mer calme mais Java est toute pleine de gros nuages gris... Nous ne verrons encore pas Ijen d'ici ! Décidément celui-là, on va se l'appeler "Désiré" ! Un peu avant d'arriver sur l'île, l'instructeur commence à me montrer comment fonctionne ce fameux gilet plein de trucs à tirer, à pousser et à surveiller. J'ai déjà du mal avec le bouton qui fait descendre et celui qui fait monter... ça commence mal ! Mais, comme je me dis toujours et ça me sauve, j'apprends bien mieux en faisant ! On verra quand j'y serai. Marc est confiant et moi aussi.

Contrairement à d'habitude, les bateaux n'accostent plus du tout aux abords du temple de Ganeshou, là où se trouve "The Dream Wall" qui était magnifique la première fois que j'y ai skorkelé... On passe le temple et le bateau jette l'ancre bien plus loin, face à Bali et non à Java.

Tous les débutants sont déjà dans l'eau ou au fond. Le gilet plus la bouteille pèsent un âne mort mais dès que je touche l'eau, je me sens comme un bouchon léger qui flotte. J'apprends vite à respirer tranquillement avec la bouteille, c'est même très relaxant . Et c'est parti, il faut appuyer sur le bouton qui descend... mais ça démarre mal, mes mains sont petites, le matériel pas de toute première jeunesse et je n'y arrive pas, il est trop dur ! L'instructeur le fait pour moi et là, c'est l'émerveillement... je me sens comme un oiseau qui vole à l'envers du monde et je n'ai qu'une hâte, me retrouver au fond avec tous les autres. Je fais signe à l'instructeur que tout va bien, nous sommes descendus d'un petit mètre. Il m'aide encore à appuyer sur ce bouton que je ne dompte toujours pas et nous voilà 50 centimètres plus bas à peine...

Mais là, rien ne va plus. Une aiguille vient de me percer le tympan droit, c'est une douleur que je connais bien, c'est celle que je subissais à chaque fois que mes parents me maintenaient à deux sur mon lit pour me mettre les goûtes censées réparer mon tympan. Je panique grave et la douleur me fait respirer de façon irrégulière, le signe de rien ne va plus en montrant mon tympan fait paniquer l'instructeur, nous remontons. Il veut que je décompresse mon tympan mais je sais que ce n'est pas la peine, la douleur est trop forte. Je remonte difficilement dans le bateau, je me couche sur le côté, je sais qu'il faut que j'évacue l'eau qui est entrée à l'intérieur, que je me calme et que j'attende que ça passe.

Marc est désolée, c'est pas grave, on aura essayé... Il part faire sa première plongée avec un matériel lui aussi vieillot qui fuit de partout et moi, je reste sur ce bateau qui tangue, en espérant que tout va vite rentrer dans l'ordre avec mon oreille. La douleur ne me quitte pas et j'en pleure... et de douleur et de déception. J'y ai cru l'espace d'un instant mais ce plaisir que je devine immense, nous ne le partagerons jamais ensemble... Au loin, j'aperçois Ganeshou, sur ce coup-là, il ne m'aura pas aidé ! Il y a certainement une raison...

Quand Marc remonte sur le bateau, il est un peu déçu, il n'y a pas beaucoup de poissons et les coraux sont morts... J'avais remarqué il y a deux ans le changement mais j'espérais qu'en profondeur la magie de Menjangan serait toujours aussi présente...

Le déjeuner n'a pas lieu non plus comme autrefois, près du temple qu'on pouvait aller visiter très facilement. Nous sommes trop loin. Tous les bateaux s'arrêtent au même endroit, sur de petites plages étriquées où on ne peut pas trop s'étaler et où on est les uns sur les autres...

Je trouve quand même à nous éloigner en passant par la mer, pieds dans l'eau. Avec notre pique-nique on s'installe au soleil revenu...

mais on s'aperçoit très vite qu'on s'installe au milieu d'une poubelle ! Comment est-ce possible dans un Parc National !? Qu'est devenue mon île préférée !!!??? Mon paradis sur terre et sous l'eau !??? Entre la plongée avortée et ce spectacle, l'envie de pleurer me reprend...

Je comprends mieux pourquoi on nous parque sur ces petits bouts de plage... pour ne pas qu'on aille voir ailleurs ! Quelle désolation... On déjeune rapidement, on fait bronzette en tournant le dos à ce spectacle mais le cœur n'y est pas...

Pour la seconde plongée Marc remonte sur notre bateau et moi, je rejoins les snorkelers sur un autre. J'espère qu'au second spot, il verra de bien belles choses mais je sais au fond de moi que Menjangan n'est plus celle que j'ai connue...

Quant à moi, mon oreille va mieux. L'eau qui était à l'intérieur est enfin sortie et j'ai hâte de vérifier que l'incident ne va pas me priver de ce dernier petit plaisir en mer ! Et ce n'est pas le cas, fort heureusement ! Si je me contente de flotter au dessus de l'eau, tout va bien ! Plus aucune douleur et j'attaque le deuxième spot avec mes nouveaux collègues de bateau pour la plupart, Français. Nous n'allons toujours pas au Dream Wall et je ne comprends pas pourquoi... de suite.

Quand j'aperçois l'ancre de notre bateau bien accrochée à un pendant, je comprends tout... Ici comme ailleurs, en snorkeling, il n'y a plus rien à voir ! Les belles couleurs d'autrefois ont disparu, tout est sombre, noir, la vie s'en est allée et sur 30 minutes à longer l'île, je ne trouve rien à m'extasier... Je remonte silencieuse sur ce bateau où mon homme n'est pas... J'espère qu'au moins lui, aura réussi à voir du beau dans tout ce déplorable... Dream Wall ne doit plus être et c'est certainement la raison pour laquelle les bateaux ne nous y conduisent plus...

La traversée retour est mouvementée, le vent s'est levé, la mer est déchaînée... Je me cale au fond du bateau, emmitouflée dans ma serviette déjà toute humide d'embruns. Quand on regagne la lagune, tout se calme et tout le monde se change.

Je ne peux pas, toutes mes affaires sont dans le premier bateau ! La peuchère que je suis se cale sur un rocher, regardant la mer en espérant le bateau du marin qui rentre au port ! 

Heureusement il ne tarde pas trop. Marc revient dans le même état que moi... déception déception quand tu nous tiens... On rentre à l'oustau heureux de la balade mais dépité par tant de massacre de Mère Nature...

On décide, pour se remonter un peu le moral de retrouver nos singes et de visiter le temple de Pulaki.

Et nos collègues sont là, bien plus nombreux qu'hier soir ! C'est magique !

Le temple est bien entendu désert ou presque. Tous les singes sont affairés en bord de mer.

Nous montons à la tour admirer ce spectacle au soleil couchant. Certains sont encore dans les arbres. Ils ne nous calculent pas, tous affairés à manger quelque chose.

Près des pierres de la fertilité, en contre-bas, une famille vient d'arriver chargée d'offrandes. Un prêtre les accompagne et l’aînée de la famille tient les singes à l'écart munie d'un bâton. Les fruits de la mer c'est bien, mais pour les singes, les offrandes, c'est mieux ! Ils rappliquent tous, attendant le moment de s'emparer de tout. 

Et ça ne loupe pas ! Dès que le prêtre a terminé sa petite cérémonie, les singes se jettent sur les offrandes. C'est la foire d'empoigne !

On quitte les lieux, un peu réconciliés avec cette journée pleine de rebondissements pas toujours agréables ni plaisants...